Vie à bord de Vagabond
Deux personnalités nouvelles se sont installées dans notre environnement quotidien, de manière bien concrète ou parfois invisible…
Dagmar : vaisseau fantôme-bateau pirate, viking semé hier dans la glace, tantôt derrière tantôt devant. La fière coque rouge battant pavillon allemand, munie de flèche, foc, clin foc, vergue et bôme immense fait même route que nous. Plutôt qu'une compétition, c'est une complicité entendue qui lie les deux équipages. Nos " cousins germains " comme les appelle Gérard, en sont à leur 4eme tentative de passage par cette route. Nous réalisons ensemble la chance que nous saisissons cette année, avec des conditions de glaces qui s'avèrent exceptionnelles. Plutôt invisible hors des escales, ils n'en sont pas moins bien présent. Belle sensation de nous savoir deux voiliers rassemblés dans cette aventure unique, deux voiliers étrangers totalement différents. Si nous réussissons ce passage ensemble et en une seule saison, le symbolisme, vu le contexte actuel, nous semble aussi fort que la page d'histoire qui se tournera.
Plus concret, Boris. Embarqué à Mourmansk, cet ancien pilote de glace russe sexagénaire a pris doucement sa place au sein de notre petite équipe. D'abord, il nous a étonné par son adaptation rapide au comportement agité de Vagabond. Petit à petit au fil des conversations, nous décelons même son humour. Depuis le départ de Karen à Dikson, dorénavant unique interprète à bord, il assure tant bien que mal aux escales les relations et traductions avec les gardes côtes, nous assiste avec empressement (plus parfois qu'avec efficacité…) dans les aspects logistiques tels que l'approvisionnement en gasoil, en l'eau, la recherche d'une connexion internet ou d'un sauna. Sur ce dernier point, il est têtu ; pas question de rester sur un échec. Une fois les formalités d'entrées accomplies à Tiksi, nous ne comprenons pas son air contrarié ni ses conversations orageuses avec les douaniers.
" Un problème ? " demande Eric inquiet.
" Oui. Ils ne trouvent pas les clefs du sauna pour tout de suite. " (23h heure locale !)