Vie de contrastes
Comment décrire les contrastes que nous ont offert les missions de cet été. Pour ne parler que du coté Nunavut, les trois semaines passées avec Maya Bathia et ses collègues autour du Jones Sound n'ont été que beau temps, débâcle autour de Grise Fiord, manips à la dérive devant de majestueux fronts de glaciers et même camping ! Avec Andrew Hamilton et Gabriel Joyal les trois semaines suivantes nous sommes montés vers le nord, le froid et les brumes. Avons dû nous abriter d'un coup de vent, filer vent arrière par forte houle, faire demi tour dans cette baie Talbot, objectif principal de la mission pour blocus de glace... Nous y avons même cassé le bras du si précieux sondeur multi-faisceaux à cause de trop de chocs inévitables. Mais nous y sommes retournés et avec patience, sommes parvenus à faire le travail prévu à force de tours et de détours dans le labyrinthe embrumé, et à larguer un mouillage océanographique (chapelet d'instruments flottants dans la colonne d'eau) qu'Andrew tentait de réaliser depuis 4 ans sans succès ! La redescente vers Arctic Bay où Vagabond va hiverner s'est faite pratiquement d'une traite, avec pour carotte la rencontre avec l'Austral, paquebot de la compagnie Ponant, où nous avons donné une conférence. Une vraie escale technique ainsi qu'un moment hors du réel goûtant à un luxe extrême. Et d'autant plus après quelques jours à se nourrir comme on le peut en fonction de la mer, à être tendu ou même à ressentir l'angoisse dans du vent trop fort avec une grand voile coincée haute...
Vie de contrastes... pour résumer le sentiment du moment, vivre sur un voilier dans l'Arctique avec des missions toujours différentes, c'est expérimenter une vie de forts contrastes semée de moments magiques comme de moments vraiment durs. Même en famille, les moments durs soudent et les retours au positif n'en sont que plus forts. Expérimenter la fatigue, la faim et même la peur permet d'apprécier plus encore les moments de beauté et de joie. Tout est exacerbé. Et puis cette vie nous l'avons choisie, la faisons devenir réalité chaque année depuis 20 ans, et rien ne vaut cette liberté. Liberté de profiter de ces territoires qui continuent de nous fasciner en même temps que de nous rendre utiles à la science.