Avant que la banquise ne soit plus praticable, par France Pinczon du
Les mois de mai et juin sont LA saison pour partir camper. Ensuite, la banquise devient hasardeuse à parcourir à pied sec, puis les flaques de fonte se trouent et l'océan noir apparaît comme un puzzle sournois.
15 jours après mon anniversaire, c'est le moment du fishing derby mais sans motoneige, impossible de s'y joindre. Le vent est fort, nombreux sont ceux qui font demi-tour avant d'arriver aux lacs choisis tant le pilotage, en traînant les lourds qamutiks familiaux, s'avère dangereux. Des trous sont ouverts un peu partout dans notre baie pour la version village du concours de pêche. Dès que le vent se calme, nous partons camper à l'entrée du fjord qui mène à notre baie. En 5h de marche et ski le long des falaises et une première fracture de glace à traverser, nous changeons d'univers. Encore du froid cependant la tente n'est plus installée sur de la neige mais sur un parfait tapis de petites pierres fendues par le gel. Et on respire, avec un horizon agrandit sur le fjord de l'Amirauté immaculé et ses 20km de large !
10 jours plus tard nous parcourons la baie Victor pour nous installer à sa pointe nord-ouest. La banquise y est plus belle que dans la notre cependant nous devons faire 2 bons détours afin de trouver où traverser les deux fractures trop ouvertes pour nos pas. A l'arrivée, proche d'une cabane de week-end, nous découvrons la vie qui renaît. Beaucoup d'oies se laissent approcher ou crient dans le ciel. Et puis nous avons maintenant deux chiens : Stone et Mickie, prêtée pour un mois par Paul, le chef mécanicien du village. Ainsi chaque fille a son chien, pour leur plus grand bonheur !
Enfin pour le 10 juin, anniversaire d'Eric, nous repartons attelés de la même manière à nos pulkas et à nos chiens, mais sur une banquise turquoise de flaques de fonte. Eric tente même le kite avec un peu de vent. Trajet magique mais bain de pieds froid assuré. Et le retour sera encore plus aquatique : on aura l'impression d'aller d'îlots en îlots à travers-lac ! Dans une jolie petite baie à notre taille nous coulons quelques jours paradisiaques, crapahutant sur les rochers, découvrant une multitude d'oiseaux et quelques nids, des bruants des neige autant que des goélands et même un faucon. L'air est maritime, tandis que la banquise inondée de bleue cache encore une bonne épaisseur de glace.
Mi juin, partir camper à pied par la banquise n'est plus raisonnable. A défaut, avant les premières pluies, nous bivouaquons à la belle étoile... ou plutôt sous le soleil permanent !