Belle mission, bonne escale, par Eric et France

  • Banquise decomposee et icebergs baie Meteor
  • Mise a l'eau filet a plancton

Après une courte escale logistique à la base aérienne de Thulé avec Anders, David et Allan, nous les observons à l’œuvre sur l'île Saunders. Allan n'est pas ornithologue mais guide de montagne : c'est en rappel dans la falaise et le plus discrètement possible qu'il parvient à recapturer les guillemots équipés de capteurs depuis un ou deux ans (suivi des migrations et des plongées). De retour au site de travail principal, une immense colonie de mergules nains (les centaines de milliers d'oiseaux ne semblent pas perturber les deux douzaines de boeufs musqués voisins), nous entamons un transect de 120 miles nautiques ponctué d'une douzaine de stations avec filet à plancton (jusqu'à 50m) et CTD (jusqu'à 500m). De quoi déterminer les qualités de l'eau ainsi que les masses de copépodes et autre plancton dont se nourrissent les oiseaux. Les manoeuvres sont bien rodées sur la plate-forme arrière de Vagabond, elles nécessitent le concours de tous dans la houle.

C'est juste avant ces deux jours en haute mer que le moteur tribord tombe en panne... Heureusement Vagabond possède deux moteurs et la mission se poursuit normalement, à une vitesse légèrement réduite. Par chance la météo est favorable.

La semaine suivante, seul David reste à bord afin de recenser les nombreuses colonies d'oiseaux dont regorgent les falaises de la région de Savissivik et de la réserve de la baie de Melville. Fantastique cabotage, entre mer d'huile et 40 nœuds de vent, slalomant dans les fjords encombrés d'icebergs et de grandes plaques de banquise de l'hiver passé. Il devient parfois impossible de s'y faufiler ! L'une de ces plaques de glace abrite une centaine de phoques du Groenland qui se prélassent au soleil... non loin, deux ours rodent, alléchés. Les mouillages sont atteints tardivement le soir, mais offrent le plaisir de mettre pied à terre quelques instants le lendemain, avant de repartir. Un bon coup de filet, alors que nous traversons une zone très fréquentée par les oiseaux, nous permet une excellente collecte de copépodes Calanus, la proie préférée des mergules nains. L'escale à Savissivik est glaciale, la brume trop dense pour reprendre le départ, le vent souffle... une dernière nuit de navigation ventée nous ramène vers le reste de l'équipe, que nous embarquons très tôt, hâtés par le mauvais temps annoncé.

De retour sur l'île Saunders, Vagabond se tient prêt, à l'abri devant une cabane de chasse, tandis que Anders et Allan récupèrent avec brio la plupart des capteurs confiés aux guillemots désignés volontaires pour la science.

L'ultime station de prélèvements d'eau et de plancton s'avère difficile, avec des vents atteignant 30 nœuds. Impossible de collecter les copépodes que l'équipe souhaite rapatrier vivants au Danemark ! Vagabond mouille devant le village historique de Dundas (abandonné lors de la création de la base américaine), plus abrité que le port de Thulé. La mission est terminée. Une réussite pour nos amis scientifiques danois, une riche expérience pour l'équipage de Vagabond.

David Boertmann nous dédicace le livre qu'il a écrit sur les oiseaux du Groenland, offert par David Gremillet en 2005 lors d'une mission similaire sur la côte Est du Groenland.

L'escale technique et logistique est facilitée par la gentillesse et les compétences des danois et groenlandais qui travaillent pour la base aérienne de Thulé (peu de contacts avec les américains). Approvisionnements de toutes sortes, et surtout réparation du moteur tribord (grâce à une pompe à injection neuve offerte par un responsable de Yanmar au Japon, lors de notre séjour en 2003 !).

Léonie et Aurore ne se rassasient pas de faire du sport au "fitness center", de profiter de la salle de jeux du "community center" ainsi que du restaurant de la base... Quel contraste avec la nature dont est fait d'ordinaire notre quotidien !

Des vents violents (et chutes de neige !) nous retiennent encore quelques jours à Thulé, c'est l'occasion de constater que l'ancre vient d'être suffisamment consolidée ! Nous atteignons finalement Qaanaaq avec un jour de retard, prêts à embarquer Emmanuel Hussenet et sa petite équipe.