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Blizzard aveuglant

  • Nael et projecteur

"Durant quatre jours nous avons cherché du regard nos repères habituels : plus rien ! La tente et les niches des chiens avaient disparu. Il y avait seulement un vent violent faisant tourbillonner la neige dans un bruit assourdissant. Ce blizzard brûle le visage et il est difficile de garder les yeux ouverts. Nous avons dû stopper l'éolienne à cause d'un vent établi force 8. Dans cette situation, nous n'allons à terre que pour nourrir les chiens et vérifier qu'il n'y a pas de souci avec la tente. Nous venons d'une petite île de l'Atlantique (île d'Yeu, ndlr) et nous pouvons dire que nous connaissons bien les tempêtes et que dans un sens, elles nous grisent. Mais ici, la différence est la perte des repères visuels. Mais aussi déstabilisante qu'elle soit, cette force naturelle est fascinante. Même si nous ne savons pas combien de temps cela peut durer et que la tempête pourrait briser la banquise, nous nous sentons en sécurité à bord de Vagabond, toujours f igé dans son écrin de glace." Amélie et Hervé


Entre chien et loup

  • Vagabond fin novembre 2008

"Nous avons cette sorte de lumière crépusculaire durant quelques heures, au loin vers le sud, quand le ciel est dégagé et ce jusqu'à deux heures de l'après midi. La nuit n'est donc pas toujours complète. Nous pouvons alors voir les montagnes se dessiner sur le ciel. Le paysage est toujours changeant, cela dépend de la neige qui est tombée, du vent ou de la couleur du ciel et de l'intensité de la nuit. Nous ne nous sentons jamais seuls tant il y a de choses à faire, à contempler, à apprendre, à méditer. Une chose difficile à expliquer est la notion du temps, différent de celui que nous vivons dans la société. En fait, si nous n'avions pas d'ordinateur ou de journal de bord, nous perdrions la notion des dates. Et souvent, pendant la journée, je me demande quelle heure il est. Les heures qui passent ne sont ni plus ou moins longues mais différentes, c'est le temps Arctique. Nous vivons juste au rythme de la nature et c'est une grande chance !" Amélie


Pas de routine, seulement quelques habitudes

  • Pleine lune devant Vagabond

"Certaines personnes se demandent comment nous occupons nos journées. Donc, après un copieux petit déjeuner, la première chose est d’envoyer le relevé météo à l’aéroport de Longyearbyen. Ensuite, nous nous consacrons à la rédaction d’emails, d’articles ou de notre journal de bord. Tandis que Nael se concentre sur ses activités scolaires, nous faisons un peu de ménage à l’intérieur. Nous devons aussi balayer le pont arrière pour éviter qu’il ne gèle. Nous pouvons aller à terre prendre de la glace ou de la neige pour nos réserves d’eau stockée dans des bidons. Nous faisons aussi des mesures de glace. Nous devons également nourrir les chiens et nous leur consacrons toujours un peu de temps. A bord il y a toujours des choses à faire : bricolage, couture, cuisine…. Grâce au poêle à pétrole qui nous sert également de cuisinière, la température à bord est d’environ 15 degrés. Le groupe électrogène qui tourne deux heures par jour e t l’éolienne assurent les besoins en électricité et pour économiser, nous nous éclairons à la flamme des bougies. Après dîner, nous regardons un film, lisons ou écrivons. Une chose est sûre, nous vivons le moment présent comme unique mais le temps passe à une vitesse folle !" Amélie et Hervé


L'heure du silence

"Plus un bruit, plus un mouvement : tout est immobile autour de nous depuis que la pleine lune éclaire la baie. Nous entendons seulement au cours de la journée le chant des chiens à l'unisson rappelant celui des loups et le bruit de l'éolienne tournant plus ou moins vite. Même le glacier, tel un colosse pétrifié par le froid, s'est tu. Nous sommes donc passé d'une vie de marin à une vie de banquisards, troquant nos bottes en caoutchouc contre des plus grosses et isolantes. La glace est maintenant assez épaisse (20cm environ) pour que l'on y marche sans risque. Malheureusement, avec la formation de la banquise, les ours, que nous voyions jusque là tous les jours, se font de plus en plus rares et nous n'en voyons plus que de temps en temps. Sinon, nous avons trouvé notre rythme et vivre dans la nuit polaire ne nous pose pas pour l'instant de réel problème, et certainement pas pour Nael qui, chaque nuit, fait le tour du cadran !" Amélie


Ma première "expédition"

  • Nael et Tiksi

"Je m'appelle Nael, j'ai cinq ans. Etre sur Vagabond est ma première expédition avec mon papa et ma maman. Autour de nous il y a des montagnes, un glacier. Je vois beaucoup d'ours et un jour quand on se baladait, un nous a suivis et quand il nous a vus de près, il est vite parti. J'ai aussi vu un renard arctique au bord du fjord. A terre, je fais du ski, je m'amuse dans la neige. J'aime m'occuper des chiens et quand on leur donne à manger, il faut leur dire de s'asseoir et d'attendre. C'est Imiak le plus gourmand, Frost me fait des câlins. A bord, je fais du travail d'école, du bricolage, des dessins, je cuisine et je balaye la neige sur le pont. Ce que j'aime, c'est apprendre des choses de marin, les noeuds par exemple. Je suis content d'être ici parce que le paysage est très beau. Parfois, ma famille et ma chienne Belle me manquent et j'aimerais bien manger des frites de ma mamie. La plus belle chose que je vois, ce sont les aurores boréales, c'est comme de la mag ie..." Nael


Perte du ballon météo

"Eric, c'est navrée, désolée, que te t'écris ce soir : nous avons perdu le ballon. Le temps était calme et le ciel se dégageait, tout était prêt, mais au moment d'envoyer le ballon, le vent est monté vite et fort. Nous avons tout de suite décidé d'arrêter le sondage et de rentrer le ballon dans la tente. Il était rentré mais la bâche encore ouverte, et là, persuadée que Hervé le tenait devant, j'ai lâché l'arrière pour fermer la petite porte et l'appel d'air a fait qu'en un dixième de seconde, le ballon est sorti. Hervé a bien réussi a le tenir quelques secondes par le bout, mais celui ci s'est rompu... Je ne sais pas comment t'exprimer à quel point nous sommes désolés, nous nous sentons ridicules, démoralisés..." Amélie


Un mois

Partie du petit port de Longyearbyen au Spitzberg il y a tout juste un mois, la petite famille se familiarise jour après jour avec un environnement sauvage. 120 km/h de vent, l'ancre entraînée par le pack de glace et le bateau qui se retrouve alors à quelques mètres de la côte, voilà une des nuits agitées que peut vivre le petit équipage du voilier polaire Vagabond. Heureusement, le calme revient aussi vite que la tempête est arrivée et tout est maintenant rentré dans l'ordre. Au fond de la baie d'Inglefield, à l'Est de l'archipel, le bateau est de nouveau ancré à cinquante mètres du rivage. Il est tantôt pris dans la glace, tantôt en eau libre, la banquise n'étant pas encore complètement formée. L'ennui et la solitude ne sont pas de mise dans cet endroit pourtant situé à deux jours à pied du premier endroit habité. Et pour cause, en trois semaines, ce n'est pas moins d'une trentaine d'ours blancs qui sont passés parfois à quelques dizaines de mèt res du bateau. Curieux avant tout, ils ne montrent pas de comportement agressif mais chaque déplacement se fait néanmoins armé d'un fusil et de pétards dans les poches afin de les éloigner au cas où ils se montreraient trop entreprenants envers les chiens ou le matériel disposé sur la berge. Pour Hervé, Amélie et Nael, âgé de cinq ans, les journées s'organisent suivant la météo. Au programme, si le vent est très faible : expérience scientifique à l'aide d'un ballon sonde muni de capteurs, qui est envoyé à environ 1500 mètres d'altitude. Sinon, les trois aventuriers se baladent à ski tractés par un ou deux chiens et ce, tant que la lumière du jour le permet. En effet, depuis le 28 octobre la nuit polaire s'est installée sur la région et la lumière n'est présente en ce moment que de dix heures à quinze heures. Les températures actuelles oscillent entre -10 et -15 °C et après une journée à l'extérieur, il fait bon retrouver l'atmosphère chaleu reuse du carré. Certains petits rituels sont déjà en place comme chaque matin, l'envoi du relevé météo ou les deux heures quotidiennes d'activité scolaire pour Nael. Selon le petit garçon, le plus extraordinaire est le spectacle grandiose des aurores boréales : lumières vertes, magiques, qui animent le ciel les nuits de beau temps.


Quand la baie d'Inglefield se transforme en marmite bouillonnante.

  • Tente inondee coup de vent

"Il y a six jours, durant la nuit, un gros coup de vent et un pack de glace très dense ont entraîné l'ancre. Le bateau s'est alors échoué tout près de la côte. Nous étions impuissants face à une telle force de la nature, les vagues et les morceaux de glace recouvrant une grande partie de la moraine. Les chiens, les pattes dans l'eau, étaient étonnés de voir le bateau si proche d'eux. Nous avons attendu la marée montante pour pouvoir allumer les moteurs et nous avons eu la chance de réussir à sortir le bateau de cette mauvaise passe. Le lendemain, plusieurs heures ont été nécessaires pour remettre convenablement l'amarrage. Peu de temps après, un autre coup de vent mais de direction opposée à fait repartir tout le pack à une vitesse incroyable. Pour l'instant, le calme est revenu sur Inglefield. Nous en profitons pour prendre un peu de repos et nous préparer à de nouvelles aventures." Amélie et Hervé


Apprendre à marcher sur des oeufs

  • Embacle

"En cette période d'embâcle, il y a différentes possibilités pour rallier la terre ferme. Nous mettons plus ou moins de temps selon les options. La première est aisée lorsque nous sommes en eau libre. Nous avons juste à suivre le bout du bateau jusqu'au rivage. Cela se complique quand la nouvelle glace est formée, pas assez solide pour marcher dessus mais assez dense pour empêcher l'annexe d'avancer. Dans ce cas, les 50 mètres jusqu'à Vagabond peuvent devenir très longs. Nous devons tirer, pousser, casser la glace avec le piolet. La troisième façon demande beaucoup de prudence. Vêtus de combinaisons étanches, nous marchons doucement sur la glace, tirant l'annexe avec Nael à bord. Jusqu'à présent, pas de bain glacé ! C'est alors que nous voyons passer près de nous les ours de leur pas assuré et débonnaire. Les premières lueurs viennent à dix heures le matin et disparaissent vers quinze heures. Quoi qu'il en soit, nous organisons nos journées selon la météo. Nous faisons des sondages avec le ballon lorsque le vent est faible et sinon, nous élargissons le périmètre de nos ballades avec les chiens, admirant des paysages majestueux." Amélie et Hervé