Installation à Qik

  • Leonie decouvre sa classe
  • Plein de carburant avant hivernage a Qikiqtarjuaq

Qikiqtarjuaq, 500 habitants environ, très accueillants. Nous y sommes depuis mardi soir, à peine une semaine après avoir quitté Grise Fiord. La dernière nuit de navigation fût longue : le vent (léger) était de face, une houle venait du large, l'obscurité était totale à cause des nuages, il neigeait fort par moment et le radar ne distinguait plus les icebergs et autres glaces. Finalement, nous avons trouvé la petite baie convoitée, à trois kilomètres du village, malgré l'imprécision habituelle des cartes dans ces régions peu fréquentées.

Dimanche dernier à Clyde River, nous avons vécu quelques belles rencontres, et retrouvé Bob Shepton et son équipage à bord de Dodo's Delight. Il y a eu près d'une trentaine de bateaux dans le passage du Nord-Ouest cet été !

Qikiqtarjuaq est construit sur l'île Broughton, face à l'immense île Baffin. Lors d'un comptage très récent, quinze ours ont été repérés sur la petite île ! La population augmente vite depuis qu'il n'est plus chassé, les villageois nous ont vite mis en garde. Les narvals sont très nombreux également, et la saison de chasse vient de s'achever avec 26 captures jeudi dernier (quota total par an : 70). Tous les bateaux étaient sortis du petit port, c'était le bon moment pour y entrer avec Vagabond et faire le plein des réservoirs de gasoil et d'eau ! Léonie va à l'école Inuksuit depuis mercredi, Aurore a découvert l'espace pour les jeunes enfants hier, toutes les deux sont ravies d'avoir de nouvelles copines. Armés de cadeaux confiés par notre amie infirmière de Grise Fiord, qui a vécu cinq années ici, nous faisons peu à peu connaissance avec les familles de Qik.

Quel confort d'avoir un réellement bon abri si près du village ! En attendant la formation de la banquise, si la mer est bonne, nous pouvons rejoindre le village en annexe en vingt minutes, ou bien en déplaçant Vagabond et en jetant l'ancre temporairement juste devant le petit port.


Pleine lune et anticyclone

  • Ile Bylot

Vagabond est à mi-parcours entre Grise Fiord et Qikiqtarjuaq (1200km). C'est l'équinoxe, France et moi avons autant de quarts de nuit que de jour. L'hiver s'annonce précoce cette année, mais par chance un bel anticyclone s'est installé sur notre route. La pleine lune et le soleil nous permettent de mieux repérer les icebergs et d'admirer les côtes très enneigées des îles Devon, Bylot, et Baffin. Les vents portants ou faibles limitent considérablement les embruns givrants !

Finalement, France et moi avons pu débarquer à Grise Fiord mardi matin, et y retrouver Aurore et Léonie, bien entourées. Tandis que France s'occupait d'officialiser notre entrée au Canada, avec Ed et Patrice de la Gendarmerie Royale, je gravissais la montagne voisine pour récupérer le troisième et dernier appareil photo. Un jeune chien libre m'a suivi tout du long, pas toujours très rassuré dans les pentes neigeuses ! Le soir même, alors que la nuit tombait, il était temps de hisser les voiles. A nouveau, beaucoup d'amis sont venus sur la plage, pour nous dire adieux cette fois. Gorges nouées. Deux ans de partage, dur de tourner la page.

Hier matin, notre petit équipage familial s'est réveillé au mouillage, à l'abri du cap Bathurst (île Bylot), reposé. Un ours est passé sur la berge tranquillement. Peu après, Vagabond a rejoint son propre sillage, laissé il y a dix ans à la fin de son tour de l'Arctique.

Demain, nous ferons escale à Clyde River, seul et unique village sur notre route.


Adieux au fjord du Cap Sud

  • Retour Vagabond a Grise Fiord

"Léonie ! Léonie ! Léonie !", scandaient ses copines alors que nous approchions du rivage en annexe. Nombreux de nos amis de Grise Fiord étaient là samedi soir, pour nous accueillir, à notre retour du Groenland. Un peu fatigués par la traversée depuis Qaanaaq, nous étions d'autant plus émus. Les vents étaient portants, heureusement, mais la houle forte et le pilote automatique en panne. France en est tombée sur la tête, sans conséquence hormis une escale imprévue aux îles Carey. Superbe archipel, totalement inhabité mais nettement plus abrité que nous l'espérions, parfait pour y trouver un peu de repos. Quant à Léonie (6) et Aurore (3), elles sont restées en pleine forme pendant toute la traversée entre le Groenland et le Canada ! Et sont ravies d'être à Grise Fiord depuis, accueillies par Joanne, l'infirmière.

France et moi sommes repartis aussitôt pour le fjord du Cap Sud, cinq heures plus loin. Une météo exceptionnelle nous a permis de mener à bien diverses missions, et de faire nos adieux à notre inoubliable site d'hivernage (2011-2012). Après une courte nuit au mouillage, il s'agissait de gravir la pyramide voisine pour récupérer deux appareils photos, installés avec Christian Haas en mai dernier. Assez peu de neige finalement, le terrain était tout à fait praticable, et la vue magnifique sur toute la région. Pas un souffle, grand soleil, nous sommes restés plus d'une heure au sommet. Ensuite, on ne pouvait quitter la zone sans faire une CTD au milieu du fjord, à l'endroit habituel. De même que deux lignes de sondes, toujours à la recherche d'explications sur les échanges particuliers entre ce fjord et l'océan. Un prélèvement de plancton pour finir, et nous faisions route vers Grise Fiord, heureux de ce petit week-end à deux !

Le vent et la houle nous retiennent à bord depuis hier soir, vivement l'occasion de débarquer pour revoir brièvement nos amis avant de faire route vers le sud.


De la baie Marshall à Qaanaaq

  • Tous les drapeaux du monde

6 septembre. En attendant la marée haute qui permettra de relever l'ancre, nous profitons à nouveau du soleil pour un pique nique à terre. Il est temps de faire route vers le sud. Les glaces se sont rapprochées de la côte avec le vent de sud-ouest, la lumière est belle. Afin d'étayer son message de conscience face aux convoitises tournées vers les régions arctiques, Emmanuel aidé de Catherine et Bénédicte déploient les 193 drapeaux en une ronde colorée sur une belle plaque de glace. Vagabond tourne autour d'eux afin d'immortaliser en images cet instant symbolique. Emmanuel, avec sa plume engagée, transmettra plus tard son message aux différents pays. Comme prévu, la brume tombe et le vent se lève vers une heure du matin, Vagabond jette l'ancre à proximité de l'île Littleton, dans une petite baie qui découvre presqu'entièrement à marée basse ! A terre, nous observons encore beaucoup de restes de huttes de pierres.

  • Eric prelevement plancton

Le lendemain, le vent souffle toujours fort lorsque nous cherchons un mouillage pour explorer l'île de Littleton. Après en avoir fait le tour, une partie de l'équipe parvient à débarquer, à la recherche de vestiges laissés par les explorateurs du siècle dernier. Malheureusement, la neige couve ses secrets, seul le gros cairn au sommet de l'île se manifeste. Là encore, une bouteille et un message laissés par l'équipage de Dagmar Aaen il y a 4 ans. Eric peut tout de même inspecter la station météo réinstallée voilà deux ans. Le vent est fort, très fort en haut de l'île. Puis Vagabond, dos au vent, poursuit rapidement sa route vers l'abri le plus proche, la baie Kenrick, en attente pour passer le fameux cap Alexander. Dès le lendemain le vent mollit, la route est radieuse le long de la côte enneigée. Si calme que le filet à plancton est remis à l'eau, de minuscules organismes très rouges s'agitent au fond de leur bouteille ! Dans la nuit Vagabond laisse tomber son ancre à quelques heures de Qaanaaq avec un jour d'avance sur l'avion de nos amis.

  • Tempete 65 noeuds au mouillage

Aurore et Eric partent en balade à terre, par un temps splendide, pendant que le reste de l'équipe fait la grasse matinée. Mais l'ultime pique-nique à terre est soudain écourté par de sérieuses bourrasques. Nous redescendons vers la plage le plus vite possible et la mer, d'huile auparavant, est déjà bien agitée lorsque nous retrouvons Vagabond. Très rapidement, quarante puis cinquante nœuds s'établissent, puis soixante, jusqu'à soixante cinq nœuds en rafales ! l'ancre dérape, la mer est blanche, des bouts d'iceberg passent rapidement à nos cotés... C'est au moteur, toute l'après midi, que nous soulageons notre mouillage. Tension, histoires pour enfants, chacun s'occupe à bord non sans admirer le spectacle au dehors, tout en tirant des bords sur place ! Au matin suivant le vent se calme finalement, l'ancre a dérapé sur 800 mètres ! Vagabond a juste le temps de tracer vers l'aéroport pour déposer l'équipe, sans même passer par le village.

Seuls à nouveau, tous les quatre, nous allons rendre visite à Birthe et Hans et profitons du retour du beau temps, à terre. Par un heureux hasard nous retrouvons Marius et Naja, qui nous avaient si chaleureusement accueillis chez eux à Savissivik voilà deux ans. Nous sommes aussi déçus qu'eux de ne pouvoir honorer leur invitation, puisque nous sommes sur le départ et le créneau météo n'attend pas !

Toutes les photos.


Sortis du piège de glace

Cette baie Fram est un piège protecteur, Vagabond risquerait d'y passer l'hiver... Le pack défilant dans le détroit de Rice depuis hier (1er septembre) nous engage à le suivre, en direction du sud. Dès la sortie de la baie nous sommes emportés sur un tapis roulant qui charrie des plaques agressives, épaisses, offrant peu de marge de manœuvre. Sans parler du petit vent contraire qui pousse Vagabond sur un bord de l'étroit détroit. Lorsque les mouvements se calment, c'est parce que le chenal est rempli, les glaces sont imbriquées en un puzzle géant. Une plaque trop haute vient emboutir l'arrière de Vagabond déjà immobilisé, pliant le câble qui tient le mât, sous la plate forme arrière... Heureusement, celle-ci se contente de se déformer sous la pression.

  • Baie Cache

Nous bataillons pour éviter de trop exposer la coque, et moins d'un mille nautique a été parcouru en une demi journée ! Après une heure de répit, à notre grande surprise, le courant s'inverse, nous tentons cette fois de repartir vers le nord. Atteignant rapidement la sortie du chenal, nous découvrons enfin une bande d'eau libre le long de l'île Pim, nous voilà sortis du piège ! Nous passons devant le camp Clay, mais il y a trop de neige pour l'observer. De plus, une large barrière de pack compact nous sépare toujours de l'eau libre, en direction du Groenland. Nous sommes à l'endroit le plus étroit du détroit de Smith et l'apercevons, rose sous les rayons du couchant, à 20 miles nautiques, bien moins enneigé que le Canada blanc. Les scientifiques qui nous envoient les cartes de glaces et photos satellites annoncent des conditions hivernales en avance d'une semaine. Dans le passage du nord ouest, des voiliers capitulent. Plus au Nord, l'équipage de Babouchka vient de se faire récupérer par un brise-glace russe. Dans le bassin de Kane, juste au dessus du détroit de Smith, la nouvelle glace se forme déjà. Après une tentative infructueuse, nous amarrons Vagabond à une plaque de glace, non loin de l'île Brevoort, où il nous est impossible de débarquer : nous espérions pouvoir inspecter, voire réparer, la station météo, récemment détruite par un ours, vraisemblablement. Par contre, tout en dérivant, Eric parvient à faire une dernière mesure avec la CTD (fin de la section à travers le détroit de Smith). A onze heure du soir, profitant du calme avant le vent annoncé, Emmanuel se remet à la perche, Eric à la barre, tandis que France remonte dans le nid de pie et guide Vagabond dans ce labyrinthe de glace. A quatre heure du matin elle redescend, les glaces s'espacent. A six heure, sous les premières rafales de vent, Vagabond mouille dans le refuge de Cache Point, une jolie petite baie escarpée. Seuls Aurore, Léonie et Eric débarquent à terre, toujours avides de découvertes : vestiges de campements inuits (ronds de pierres), restes de cabane, cairns et inscriptions dans le lichen laissés par les rares navigateurs et chasseurs de passage.

  • Seul sur sa plaque de banquise
  • Mission accomplie

Le 5 septembre après un bon repos, nous décidons d'aller explorer un peu plus au nord la terre d'Inglefield, laissant définitivement de coté le projet initial de poser le pied sur l'île Hans, trop au nord et noyée dans les glaces (carte des glaces impressionnante !). En chemin, nous approchons d'une autre île de glace (PII2012A1d), plus petite que la première mais bien plus escarpée. Majestueuse falaise de glace que Vagabond longe puis contourne, avant de poursuivre dans une brume de plus en plus dense. Emmanuel profite de l'éclaircie pour une séance filmée, marchant seul et perplexe, sur une plaque de banquise... Les cartes deviennent décalées, mal dessinées, complètement fausses ! Ce soir, pour entrer dans la baie d'Inuarfigssuaq par 78°31 Nord (baie Marshall), seul le radar permet de deviner la réalité des lieux, sous les rafales de neige et la brume persistante. Le vent du sud s'est relevé, ce n'est qu'au lendemain matin que nous découvrons notre abri dont une grande partie s'est vidée d'eau : à marée basse, il ne reste plus qu'un mètre d'eau sous la coque ! Enfin, le soleil est de retour. C'est ici, au plus nord de notre parcours (toast!), que nous déposons les vivres et carburant pour l'expédition de Alex Hibbert (Dark Ice Project). Après les débarquements en annexe, il nous faut plus de trois heures pour enfouir tant bien que mal sous des pierres les 8 bidons et 11 sacs, afin qu'ils échappent à la curiosité et à la voracité des ours. Pendant ce temps, Catherine et Emmanuel photographient chacun de leurs 193 drapeaux sous ces hautes latitudes, dans ce cadre unique et en sursis. L'endroit est magnifique... Collines et montagnes offrent plusieurs point de vu sur le large, trois lacs d'eau douce et peut être poissonneux s'éparpillent alentours, un site idéal pour hiverner ! Des bidons de carburant indiquent que le site peut être utilisé par un aéronef pour se poser.


A propos des îles de glace, par Preben Gudmandsen (Institut National Spatial du Danemark)

  • Ile de glace PII2012A1d-2km2

Eric, je crois que nous observons actuellement un nouveau phénomène, mais que sait on du passé, lorsque nous n'avions pas de satellite pour nous aider ?

Mes premières observations de vêlage du glacier Petermann, dans les années 90, étaient basées sur des images satellites du chenal Kennedy qui présentaient trois plaques de banquise différentes de toutes les autres en provenance de la mer de Lincoln. Ces images SAR furent enregistrées par hasard par le satellite européen ERS-1 quelques semaines après son lancement en 1991. Par chance, d'autres observations prises deux et quatre semaines avant ont montré que ces morceaux de banquise venaient du glacier Petermann. En me basant sur des observations aériennes antérieures, j'en ai déduit que le vêlage aurait lieu tous les 9 ou 10 ans.

Le vêlage suivant a eu lieu en 2000, j'avais donc raison, mais le climat a changé depuis et le vêlage majeur suivant eu lieu en 2008, toutefois plus petit qu'avant et que ce que nous avons vu récemment. Comme vous le savez, nous avons eu d'autres vêlages du glacier Petermann en 2010 et aussi en 2012. Ces vêlages majeurs proviennent de plus haut sur la langue flottante du glacier, ce qui signifie que l'épaisseur et donc le tirant d'eau a augmenté (le principal processus de fusion de la langue du glacier a lieu à partir de l'eau sous-jacente).

Cela signifie que nous avons plus d'îles de glace qu'avant, et en raison de l'augmentation du tirant d'eau, la probabilité d'échouage augmente. Oui, c'est une situation particulière que nous vivons.

Les images d'ERS-1 de la mer de Lincoln ont montré que, en 1991, il y avait aussi une île de glace venant du glacier Steensby ou du glacier Ryder mais je n'ai qu'une seule observation. Ce que nous voyons aujourd'hui, c'est que cela arrive de nouveau et plus fréquemment qu'auparavant.

De plus, vous observez une situation unique avec ces nombreux fragments de vêlages du Groenland, disséminés le long de la côte de l'île de Baffin, sondant la bathymétrie côtière (méconnue). Ne connaissant pas le tirant d'eau exact des icebergs, cela est toutefois d'intérêt mineur. Plusieurs d'entre eux se sont échoués sur leur parcours, ont repris leurs dérives pour s'échouer un peu plus au sud.

Oui, vous rencontrez quelque chose de très intéressant.


Baie Fram

  • Vagabond pris dans le pack baie Rosse

Baie Rosse. Nous bataillons dans le pack et retrouvons nos repères, l'un dans le nid de pie guidant l'autre à la barre. Mais bientôt il nous faut amarrer Vagabond à une plaque de glace, la plus grosse possible, en raison des 15 nœuds de vent qui rendent dangereux notre progression. Ainsi amarré, Vagabond dérive doucement, à quelques miles au sud de l'île Pim que nous voudrions explorer. La journée suivante se déroule dans le plus grand calme, à explorer notre plaque de glace, labyrinthe semé de flaques de fontes, solidement regelées. Les températures négatives sont arrivées. Ce matin un ours s'est approché, des phoques sont aperçus, et même une cabane sur une butte, sans doute construite lors d'une expédition scientifique. Ce n'est qu'après 36 heures de dérive que Vagabond peut enfin se frayer un chemin vers l'île Pim. Derrière nous, de la glace dense. Devant nous, le détroit de Rice qui sépare l'île Pim de l'île Ellesmere. Nous passons devant la petite baie Fram où Bart Veldink (navigateur hollandais) passa seul l'hiver dernier à bord de son voilier "Tranquilo"... Une énorme plaque de banquise bloque la sortie du détroit. Vagabond est à nouveau amarré à la glace, et grâce à elle nous parvenons à débarquer sur l'île Pim, déjà très enneigée (fin août !). Site chargé d'histoire; chacun imagine les souffrances des membres de l'expédition Greely, il y a 130 ans.

En quête de sortie, nous revenons vers la baie Rosse, en vain, trop de glaces, donc retour à la plaque de banquise qui bouche toujours l'entrée du détroit de Rice. L'été est froid cette année dans l'Arctique et les conditions perturbent bon nombre de navigateurs. Près du pôle Nord, Babouchka vient de déclencher sa balise de détresse. Quelques jours auparavant, Tooluka renonçait dans le passage du Nord-Ouest...

  • Tombe Johan Svandsen Fram Haven
  • Debarquement Fram Haven

Finalement, nous trouvons refuge dans la baie Fram. Magnifique. Sverdrup et son équipage avaient hiverné là en 1898-99 à bord du Fram. Une croix a été érigée sur un rocher à la mort de Svandsen, le docteur de l'expédition. Nous découvrons aussi les restes d'une cabane de la Gendarmerie Royale du Canada.

Hésitations sur la meilleure stratégie : la glace dérive doucement dans le détroit, la mer gèle en surface, les prévisions annoncent du vent d'est... Nous n'avions pas prévu de passer l'hiver ici !


On a marché sur l'île de glace !

  • Amarrage ile de glace PII2012A1

Une fine couche de neige souligne dorénavant les reliefs. Tandis que Vagabond double l'île Littleton, nous apercevons la station météo, remise à neuf deux ans auparavant (voir les données météo en direct). Nous tâcherons de débarquer sur l'île au retour. Pour le moment, c'est une quête un peu spéciale qui commence dans le détroit de Smith.

Guidés par les instructions et l'enthousiasme des scientifiques qui observent minutieusement les glaces polaires qui dérivent vers le sud par le détroit de Nares (entre Canada et Groenland), nous mettons le cap sur la dernière position connue de PII-2012-A-1. Sans oublier de faire en chemin une série de CTD en traversant le détroit de Smith. Dérivant à plus de un kilomètre par heure, plus grosse que Pim, l’ile voisine, PII-2012-A-1 est un énorme morceau (95km2) du glacier Petermann (nord-ouest du Groenland), détaché en 2012 et dérivant depuis au gré des courants et des vents lorsque la mer est dégelée. Le pack devient plus dense lorsque enfin nous distinguons cette immense étendue vallonnée, haute de trois à dix mètres au dessus de l'eau, très différente des banquises et icebergs habituels. Sous le vent de l'île, une baie libre de glace s'est formée; un ours nageant nous accueille, nous prenons le temps de l'observer. Peu après, Vagabond est amarré à l'île de glace, et un autre ours curieux vient musarder et tâter notre amarre ! Nous pouvons l'admirer en contre plongée de longs moments. L'ours s'installe pour une sieste à quelques centaines de mètres, mais ne semble pas intéressé par l'équipe qui débarque (embarque ?) plusieurs fois sur le glacier dérivant, curieux de découvrir un terrain si insolite. Le glaciomètre (EM31) fait partie d'une de nos excursions, saura-t-il nous informer sur son épaisseur ? Avec l'étrave au contact de ce rempart de glace, nous passons une nuit parfaitement tranquille, tout en dérivant vers le sud. Nous parcourons ainsi plus de 20 kilomètres ! Un appareil photo est ensuite installé en haut du mât pour faire une photo toutes les dix secondes, tandis que nous faisons le tour le l'île à une distance constante de cent mètres. Chaque détail de son flanc, que nous découvrons sans lassitude, est ainsi immortalisé. Parvenus à son point le plus nord, nous sommes faces à un pack de glace qui nous oblige à obliquer vers la côte canadienne.