Nicole

Triste nouvelle. Le 23 février, à Ushuaïa, Nicole van de Kerchove a été emportée par une crise cardiaque, alors qu'elle galopait à cheval dans la pampa. Nous lui avions confié Vagabond avec bonheur pendant 10 semaines, entre octobre et décembre 2006, pendant l'embâcle et la première moitié de la nuit polaire. Vous pouvez relire son journal sur ce site, qui témoigne de son enthousiasme, de son courage, de son humour. Elle était sur le point de publier un livre, écrit pendant son séjour à bord. Depuis la banquise, nous nous associons au chagrin de tous ses proches.


Séisme

21 février. A 3h50 ce matin, de fortes secousses ont réveillé toute l'équipe à bord de Vagabond, sauf Léonie. C'était comme si une main de géant avait saisie le mât et le secouait énergiquement. Pendant environ 30 secondes, le solide berceau de glace grinçait par saccades contre la coque. Les craquements étaient plus forts et différents de ceux liés aux mouvements de marée, auxquels nous sommes habitués maintenant. Rapidement habillés, après une deuxième série de secousses, nous avons fait le tour du bateau et constaté de nombreuses fractures dans la banquise, épaisse de 70cm. Tout était calme à l'extérieur, la neige tombait doucement, sans vent... Etrangement, cela s'est produit au même moment que l'éclipse totale de lune, malheureusement masquée par les nuages. Une vague plus grosse que les autres, se faufilant sous la banquise jusqu'à Vagabond, aurait-elle pu provoquer de telles secousses ? Ou bien notre fidèle glacier Inglefield aurait-il perdu un gros pan de glace, bien que cela ne se produise guère en hiver ? C'est vers 11h que, en recevant l'appel d'une journaliste norvégienne, nous avons eu l'explication : nous étions vraisemblablement les personnes les plus proches de l'épicentre du plus fort séisme jamais enregistré en Norvège. A environ 70 km du bateau, dans le Storfjord, le séisme a atteint la magnitude de 6.2 sur l'échelle de Richter. Léonie fût la seule a ne pas s'inquiéter, probablement encore sous le charme du dernier ours de passage, la veille, ou des glissades sur la glace face aux premiers rayons de soleil de l'année. Assurément, notre paradis blanc fût très animé pour la fin de la nuit polaire !


Visites

Le gros ours d'hier soir s'est laissé filmer un bon moment, à quelques mètres du bateau, sous les projecteurs. Pour ne rien gâcher, des aurores boréales dansaient dans le ciel, la lune étincelait, et il n'y avait pas un souffle d'air. On entendait l'animal respirer, et par -30°C, la neige crissait fort sous ses pas. C'était la septième visite en 2 jours. Les ours se sont rapprochés de la terre, eux aussi attendent que la banquise se reforme.


Houle

Dans 4 jours, si le ciel est dégagé, nous pourrons apercevoir le soleil quelques minutes, au sud, à midi. Ce sera la fin de la nuit polaire. Avec le retour de la lumière, les manips scientifiques sur la banquise et les balades en famille en traîneau à chiens seront plus faciles. Une bathysonde et un glaciomètre électromagnétique sont arrivés hier, ces instruments étaient sur Tara, également pour Damocles. Nos premiers visiteurs, Ariane et Hugues, sont à bord pour 12 jours de tournage. Ils découvrent ce matin l'intensité des grincements de la coque contre la glace, en raison de la houle qui parvient jusqu'au bateau, et qui a déjà emporté une partie de la banquise de la baie d'Inglefield... Il fa donc falloir attendre que la banquise se reforme pour s'y aventurer à nouveau.


Redoux

Fidèle à ses habitudes locales, la météo nous offre soudain un redoux quasi estival. Après des températures de -30°C et un ciel parfaitement dégagé, coloré par de nombreuses aurores boréales ou un crépuscule de mi-journée, voilà que le mercure indique à peine 2°C en dessous de zéro. Mais la neige qui tombe n'empêche pas Léonie de mettre un peu d'animation, en riant dans la grande pulka que tire France autour du bateau, sous les yeux intrigués des 3 chiens. Les équipiers de Tara sont déjà en route pour Lorient et n'ont pas eu le temps de nous apporter le matériel scientifique, qui viendra la semaine prochaine de Longyearbyen avec nos premiers visiteurs.


Gros ours

Hier après-midi, notre visiteur fût un acteur parfait. Le vent avait tourné depuis peu et soufflait vers la banquise, d'où un gros ours a senti notre présence. L'animal s'est approché tout contre la coque, s'est laissé filmer tout en reculant doucement, ébloui par le projecteur, puis s'est couché à une quarantaine de mètres de Vagabond. Léonie était tout excitée de le voir se relever pour repartir vers le large, après nous avoir longuement observé. Quelques heures plus tard, la visite n'aurait pas été autant appréciée puisque nous donnions un bain à Léonie !


Marées

Neige et vent du nord depuis plusieurs jours. Nous savourons le petit confort du seul point habité de toute la région, bercés par les craquements de la banquise. Vagabond est en effet si proche de la berge, qu'il s'incline et se redresse 2 fois par jour, coincé entre les plaques de banquise qui montent et descendent avec les marées.