Depuis dix jours, la neige a beaucoup fondu, la banquise est inondée. Au camp de glace, la cabane a été déplacée vers un endroit plus sec, et la tente a été démontée. Dans quelques jours, avec Joannie, Simon et Thomas, l'équipe finale de la mission, nous ferons les dernières mesures et prélèvements de GreenEdge 2015.

Belle plongée aujourd'hui, pour les prélèvements habituels. Beaucoup d'eau douce en surface, qui gèle à la rencontre de l'eau de mer, dont la température reste négative. Tout cela métamorphose les dessous de la banquise, spectaculaire.

21 juin, jour permanent : musique, solstice, fonte et réparation de l'étrave !

Camping a Kivitoo ! Le week-end dernier fût l'occasion d'inaugurer notre nouvelle tente (merci Christian), loin de toute pente neigeuse cette fois. Céline et Yves nous ont rejoint le samedi soir, feu de camp, parapente, dégustation d'un lagopède...

Suite à nos mésaventures (voir le journal du Nunavut du 1er juin), nous avons reçu une belle carte de nos amis de Grise Fiord !

Et toutes nos bottes ont été retrouvées, alors que la neige a bien fondu sur le lac encore gelé, à Nedlukseak.

Marcel Babin, directeur du projet scientifique GreenEdge, est de nouveau à Qikiqtarjuaq pour quelques jours. Je l'accompagne chez le maire à qui il présente le programme scientifique en cours. Accueil enthousiaste ! Qikiqtarjuaq offre un accès facile à de réelles conditions océaniques, chose rare dans l'Arctique canadien.

De retour de plongée, j'apporte au labo les fruits de ma collecte, que Joannie est impatiente de découvrir ! Elle prépare les échantillons avec passion.

Aurore et Léonie ont été félicitées aujourd'hui, ainsi que la plupart de leurs camarades de classes, lors d'une cérémonie conviviale à l'école. Le 10 juin, les élèves sont en vacances jusqu'au 10 août !

La sortie au camp de glace avec les elders, ainsi sont nommés les ainés, a enfin pu avoir lieu; en effet, le ciel en décidait autrement depuis 2 semaines. Vent, brumes, neige, slush... puis vient l'urgence d'avant les grands départs, avant qu'ils ne partent pour leurs campements d'été.

Ce fut avec curiosité, une belle dose de bonne humeur et de bienveillance qu'une quinzaine de personnes âgées de plus de 60 ans nous ont suivi jusque dans notre tente inondée. Ambiance magique dans son obscurité, faisant éclater la lumière turquoise par le trou du milieu, scintiller les reflets rouges du bas de la tente sur les 5 cm d'eau inondant le plancher. Chaque paire d'yeux a suivi le messager qui referma la bouteille Niskin, inspecta les instruments bizarre perchés sur des caisses, une rampe à filtration ici, un gros filet à plancton là... Celui ci leur révéla d'ailleurs quelques planctons tout de bleu irisés. Puis dehors, ambiance enjouée autour du carottage fait à la main, avec concours de qui aura la fin de la carotte ! Les algues du dessous de la banquise deviennent une réalité pour chacun de nos invités; certains, auparavant, avançaient avec certitude que ce devait être des sédiments brassés venus du fond...

A midi sonnant, certains se serrent dans la cabane chauffée pour déguster sandwichs et crêpes faits par nos soins. Puis, les rôles s'inversent. Les femmes inuites nous offrent la cérémonie traditionnelle qui préside à chaque événement important : l'une d'entre elles a apporté un qulliq (lampe à huile) afin de faire jaillir le feu. La vie. En terre émaillée ou fait de métal, le réceptacle est empli d'huile de phoque. Sur son bord est disposé un petit tas de végétaux séchés qui sera allumé, puis répandu sur tout un bord du qulliq, agissant comme une mèche de bougie. C'est le foyer, chauffage et fourneau qui maintenait la vie et la lumière dans les igloos et autres maisons de tourbes et bois flotté. Patiemment, aidées d'une des leurs qui traduit, les ainées répondent à toutes nos questions. Nous sommes comme des enfants, tournés vers leur passé, leur savoir. Scientifiques et inuits, comme dans un igloo au coin du qulliq. Simplicité, tranquillité, l'échange en est un vrai, réciproque. "Nous ne vous oublierons pas" nous disent ils, nous remerciant de les avoir accueillis.

Magnifique sortie au sommet de l'île Broughton, ce matin à 5h. Le manteau neigeux est parfait, idéal pour circuler partout, sur la banquise comme sur terre, c'est le bon moment pour grimper jusqu'à la station Dew Line. Sentiment de liberté. En profiter avant la fonte imminente !

Ce soir, barbecue avec toute l'équipe GreenEdge.

Nous avons tous envie de souffler à la fin de la semaine, Eric a même pris son samedi. Ce week-end débute avec un peu de vent, occasion de sortir les kites avec Eric (malgré les douleurs persistantes suite à l'avalanche). Lorsque le vent mollit, j'accompagne Léonie qui décide de faire du ski tiré par Ponyo. Moi, c'est Piculi qui me tracte. Le chiot commence à rivaliser avec sa mère en puissance ! Mais le vent revient, je troque alors mon chien contre le kite et Ponyo tout excité entraîne Léonie à la suite de ma voile !

Quelques entretiens en salle machine ou sous le soleil plus tard (panne du générateur, couture acrobatique sur les panneaux solaires), vient l'escapade de fin de week-end. Eric s'est hâté de retrouver notre petite famille de retour du camp de glace dimanche après midi. Lorsque la neige re-durcit un peu plus tard, il fait la piste en motoneige avec Aurore, Léonie et moi suivons à ski tractées par nos chiens, jusqu'à un joli point de vue. Surplombant la banquise au soleil, Eric installe le clavier à l'arrière du qamutiq, Aurore danse au son de la musique, je l'accompagne à la flute et ces instants magiques gravent des sourires dans nos cœurs.