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Epaisseur de la banquise

  • Glaciometre

Début des mesures avec le glaciomètre, pour Christian Haas, de l'Université d'Alberta, à Edmonton (Canada). L'instrument électromagnétique (EM31) détecte l'interface glace-eau. En le remorquant sur la banquise, on obtient un profil de son épaisseur. Un ou deux trous sont effectués avec une tarière pour calibrer les résultats.


Mer figée

  • Leonie pulkayak

Nous n'imaginions pas un déroulement si rapide, un enchaînement parfait : samedi, nous prospectons en eau libre, et décidons de jeter l'ancre par six mètres de fond; dimanche, la surface se fige; lundi, l'annexe est dégagée de la jeune glace et hissée au portique arrière de Vagabond; mardi, nous faisons nos premiers pas sur la banquise; aujourd'hui mercredi, sur une glace de treize centimètres d'épaisseur, le trajet entre la terre et le bateau est fait tout simplement à pied sec ! De plus, l'orientation du bateau nous semble idéale, compte tenu des vents dominants. Autour de nous, un miroir immense s'est formé, illuminé tantôt par un soleil rasant, tantôt par la pleine lune. En l'absence de neige, cette banquise transparente, brillante, sombre, est fascinante.


South Cape Fiord

  • Banquise de moins d un jour
  • Sillage d arrivee de Vagabond au site hivernage

76°26.9'N - 84°41.1'O. La position actuelle de Vagabond ne devrait plus changer avant le mois de juillet 2012. La banquise est en pleine formation, magnifique. Hier, nous marchions déjà sur la glace, autour du bateau. Aujourd'hui, nous avons déplacé légèrement Vagabond, pour ne plus qu'il s'échoue à chaque marée basse. Ce soir, la lune éclaire les nappes d'eau chargées de cristaux de glace, entraînées par un bon vent du nord.

Avant de rejoindre le fjord du Cap Sud, à cinquante kilomètres à l'ouest de Grise Fiord, nous avons exploré la zone entre les pointes Brume et Lee, en suivant les conseils d'Aksajuk. La glace y est très stable parait-il, et surtout le village est proche. J'ai en effet pu m'y rendre à pied en quatre heures (itinéraire superbe bien que terrain difficile en cette saison). Mais nous souhaitions un meilleur abri, moins ouvert aux vents et à la houle.

Lors de notre dernière escale au village, le 5 octobre, la mer était inhabituellement calme, au début. Le temps de faire quelques courses et une houle rendait l'embarquement trop difficile. Alors nous avons été accueillis pour la nuit. Aurore et Léonie en ont profité pour jouer avec d'autres enfants au gymnase, le soir, et nous avons assisté au retour des chasseurs (neuf phoques, un gros poisson égaré et quelques canards pour Liza et Aksajuk !). Le 6 au matin, j'ai du enfiler rapidement la combinaison étanche et sauter dans l'annexe pour rattraper Vagabond qui disparaissait dans les bourrasques de neige, emporté par le vent vers le large. L'ancre n'avait pas tenu. Un peu plus tard, avec l'aide de Norman et Jimmie pour embarquer la famille, le traîneau et tout le reste, nous faisions route vers l'ouest dans une impressionnante houle englacée.

Après des semaines passées à jongler avec la houle, il nous faudra encore quelques temps pour réaliser que ça y est, l'hivernage commence et enfin, Vagabond va redevenir un refuge sur la banquise. Pour marquer l'occasion, et avant la nuit polaire, chacun de nous quatre a reçu une lampe frontale rechargeable toute neuve !


Vent du nord mais rencontres chaleureuses

  • Banquise en formation

Derniers jours de préparatifs, avant de partir pour le site d'hivernage. Nous avons une fois de plus jeté l'ancre à l'abri dans le fjord voisin, depuis deux jours, en attendant la prochaine accalmie pour retourner à Grise Fiord. Les embruns givrants et la nuit rendent maintenant la navigation plus délicate. La température ressentie aujourd'hui, tenant compte du vent, est de l'ordre de -30°C.

Mercredi dernier, en débarquant au village, des traces d'ours fraîches nous attendaient sur la plage ! Quelques personnes ont aperçu l'animal le matin même... C'était la journée "Terry Fox", avec un cross pour tous pour lutter contre le cancer des os, un événement national dans tout le Canada. Le départ a eu lieu de l'école, où nous avons projeté un film sur Vagabond quelques jours auparavant.

Peu à peu, nous faisons connaissance avec les habitants de Grise Fiord, qui nous accueillent avec une grande générosité. Vêtements, vivres, jouets, bonbons... que de cadeaux ! Plusieurs Inuit sont déjà enthousiastes à l'idée de pouvoir nous rendre visite bientôt, pour partager leurs expériences et découvrir notre drôle de demeure. Tom ou Norman nous montreront l'utilisation du filet pour attraper des phoques. Jimmie envisage une collaboration avec Arctic College. Mark est intéressé par nos infos météo et glaces quotidiennes, pour l'Association des Chasseurs et Trappeurs. Wendy et Harold, du centre de santé, nous prodiguent quelques conseils pour les enfants, et complètent notre pharmacie. Lisa, chez elle, nous montre comment confectionner des kamiks (bottes traditionnelles en peau), puis nous conduit jusqu'aux chiens pour un premier contact avec nos futurs compagnons. Amo est ravi d'avoir retrouvé son ancre, avec l'aide de notre annexe !


Equinoxe

  • Test lampes

Message de Marc Givry : "23 septembre 2011, 9h04, le jour et l'heure de l'équinoxe, tous les hommes sont égaux avec 12h de jour et 12h de nuit."

C'est le moment de vérifier torches et frontales, tandis qu'un coup de vent nous consigne à bord ! L'ancre a dérapé la nuit dernière, mais tient bon depuis...


Trois tonnes

  • Plein carburant Grise Fiord

Hier soir, la mer était calme devant le village, et Vagabond s'est alourdi de trois tonnes de gasoil. Les réservoirs sont maintenant pleins pour l'hiver, de quoi alimenter le poêle, le chauffage central, et le générateur. Sans oublier les moteurs, pour rejoindre le site d'hivernage. Ici, à Grise Fiord, chaque maison consomme environ cinq cents litres de fuel par semaine, pour le chauffage. Près de dix fois plus que Vagabond.

Aujourd'hui, il y a de nouveau de la houle... Samedi dernier, les vagues étaient les plus grosses jamais vues par les habitants. Une petite cabane a même été emportée. Il n'y a plus de glaces dérivantes, en provenance de l'océan Arctique, pour protéger le village. Les chasseurs ont de plus en plus de mal à mettre leurs bateaux à l'eau. Hier soir, tous étaient à la chasse au phoque, et à leur retour, les chiens étaient enfin nourris.


La pression remonte

  • Au fond du fjord Grise

Depuis mercredi dernier, Vagabond est à l'abri au fond du fjord Grise. Demain et mercredi, nous devrions pouvoir profiter d'un créneau météo pour jeter l'ancre devant le village, à la sortie du fjord (trente kilomètres). Les températures de l'air et de l'eau baissent, il sera bientôt temps d'achever notre ravitaillement et de rejoindre le site d'hivernage ! En 1999, la banquise s'était formée dès le 19 septembre autour du voilier Northanger. Aujourd'hui, l'effet du réchauffement se fait sentir, mais l'hiver approche malgré tout.

Avant que la neige ne dissimule tout, nous trouvons quelques planches sur les plages, pour construire des niches ou faire un support pour le treuil par exemple. Tous les hublots retrouvent peu à peu leur double vitrage, le joint de la porte arrière vient d'être refait, des vêtements plus chauds sont sortis...


Larry Audlaluk

  • Larry et Annie Audlaluk

Mercredi, Larry Audlaluk nous a invité chez lui, et conduit jusqu'au bout de la piste, à son aire de pique-nique préférée. Au retour, il était ravi de chercher avec nous quelques objets et matériaux à recycler dans la décharge ! Larry est arrivé à Grise Fiord en 1953, lors du transfert de quelques familles du nord du Québec, voulu par le gouvernement. De cette époque tragique, il ne reste plus que sa soeur et lui. Larry s'investit beaucoup pour témoigner de l'histoire de sa petite communauté, au Canada, à l'étranger. Il apparaît régulièrement dans la presse, dans des livres et des documentaires. Sa femme Annie a prêté à France une tunique spéciale pour porter Aurore, tandis que Larry nous a confié une copie du livre d'Otto Sverdrup, "New Land, quatre ans dans l'Arctique (1898-1902)".


Préparation de l'hivernage

  • Mouillage Grise Fiord

Trois bateaux sont passés à Grise Fiord ces derniers jours : un pétrolier et un cargo, pour les livraisons annuelles de carburants et marchandises, puis un bateau de croisière avec une centaine de touristes, qui ont pu assister à un défilé de mode inuit dans le gymnase local. Beaucoup d'occupations pour les 145 habitants du village !

Marty Kuluguqtuq, adjoint au maire, nous propose d'organiser une présentation de Vagabond pour tous, à l'école. Dès que la houle le permettra, nous ferons aussi le plein de nos réservoirs de gasoil. Marty est enthousiaste à l'idée que nous puissions accueillir de temps en temps sa fille à bord de Vagabond, elle a le même âge que Léonie !

En attendant une pompe de rechange pour notre générateur, et du matériel pour les manips scientifiques, il nous rester à acheter quelques vivres et munitions complémentaires, à nous procurer une licence de chasse au phoque, à poster un disque dur avec les images filmées pendant l'été...

Jeffrey Qaunaq nous confie quatre de ses chiens pour l'hiver, ainsi qu'un traîneau et un filet pour attraper des phoques, qui constituent leur nourriture de base. Marly, Bella, Elvis, et un chiot qui n'a pas encore de nom.

Nous prévoyons d'être au site d'hivernage début octobre, avant que la banquise se forme. Nous avons été invités à hisser Vagabond sur la plage du village, mais la baie retenue pour le moment est à 45km à l'ouest de Grise Fiord, à l'entrée d'un fjord magnifique. Nous privilégions la sécurité du bateau, le décor, la possibilité de faire les travaux scientifiques confiés, et l'accès au village. Confirmation du site dans deux ou trois semaines !

Dans notre recherche du site idéal, nous avons jeté l'ancre dans Harbour Fiord, au pied de la croix érigée par Otto Sverdrup et son équipage, lors de leur hivernage à bord du Fram, en 1899-1900. Site splendide.


Premières neiges

  • Mouillage fjord Grise

A une heure de navigation de Grise Fiord, Vagabond a jeté l'ancre à l'abri d'une forte houle qui nous empêche de débarquer au village. Les sommets sont poudrés de neige fraîche, et le poêle a été rallumé pour la première fois hier. Auparavant, un hérisson de ramoneur a été improvisé avec un vieux câble trouvé sur une plage !

En quittant la Baie de Woe, nous apercevons encore un ours, sur un rocher; il semble attendre que la banquise se forme pour chasser le phoque plus facilement. Des vents de face et un courant contraire de six noeuds s'opposent à notre projet de relevés hydrographiques dans le détroit de Cardigan, nous filons vers l'est à près de treize noeuds. Le premier fjord à gauche, Walrus Fiord, porte bien son nom : une vingtaine de morses se laissent approcher sur la berge, superbe rencontre. Par contre, non loin de là, la petite baie repérée sur la carte s'avère très peu profonde et surtout, fréquentée par de violents courants de marée : il faut toute la puissance des moteurs pour éviter d'être poussés sur les hauts fonds.

Dans la Baie Hourglass, nous découvrons la cabane installée par l'équipage du voilier Northanger, en 1999. Sept personnes, dont une petite fille de deux ans et demi, ont hiverné ici en 1999-2000, cent ans après l'expédition d'Otto Sverdrup (quatre hivernages à bord du Fram). Le site est assez attirant, mais un peu loin du village (140km). Nous sommes en contact avec nos prédécesseurs, qui partagent leurs expériences et conseils.

Des lièvres gambades sur la toundra voisine, beaucoup de narvals et de phoques sillonnent le fjord, il s'agit de se nourrir le plus possible avant l'arrivée des grands froids. Le jour n'est plus permanent. En milieu de nuit, la pénombre s'intensifie un peu plus chaque jour. Dans moins de deux mois, le soleil aura disparu totalement, jusqu'en février !