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Plongée du dimanche

  • Yves remonte
  • Yves et Eric collectent clams
  • Derniers reglages pour Eric

C'est dimanche, il fait beau (-35°C), sortie en famille sur la banquise, tout le monde se réjouit ! J'embarque dans le traîneau le matériel de sécurité habituel, le fusil, du carburant... et mon matériel de plongée. France s'installe sur la motoneige avec moi, nos filles Aurore (5 ans) et Léonie (8 ans) préfèrent se caler entre les peaux de boeuf musqué et de mouton dans le traîneau, bien emmitouflées dans leurs habits inuits. Il nous faut une demi-heure, sur une banquise bien enneigée mais peu accidentée, pour aller de Vagabond jusqu'au site de plongée.

Sammy est déjà sous l'eau pour une première plongée. Sa femme Ena est au bord du trou, elle tient la corde de sécurité qui relie Sammy à la surface. S'il tire trois fois, elle l'aidera à remonter au plus vite. A côté du trou, Sammy et Philip, deux des quatre plongeurs du village, ont installé une cabane avec un poêle, qu'ils déplacent à chaque changement de site (le trou est fait avec une tronçonneuse). J'y entre avec mon matériel pour qu'il dégèle, et c'est l'heure du pique-nique. Sammy sort de l'eau avec un filet rempli de clams (mya truncata et serripes groenlandicus). Tandis qu'il vient se réchauffer et boire un café dans la cabane, France m'aide à enfiler tout mon équipement. Les plongées durent en général trente minutes, dans 15 à 20 mètres de profondeur, l'eau est à -2°C. Un plongeur remonte lorsque sa bouteille est presque vide !

Je descends à mon tour, avec une lampe sur la tête, une caméra, un filet pour collecter des clams, des oursins et des algues. Bientôt je prendrai aussi de quoi prélever des sédiments et un instrument pour aspirer les algues qui poussent sous la banquise (très peu en cette saison faute de lumière). J'explore, je filme, je tâche de suivre les protocoles scientifiques, et je collecte des clams pour offrir à quelques amis au village et pour notre propre consommation ! En surface, nos femmes veillent sur nos lignes de vie. Elles sont heureuses de se retrouver; Ena est professeur d'Inuktitut à l'école du village, Aurore et Léonie l'adorent. Des chasseurs s'arrêtent de temps en temps, viennent prendre des nouvelles et des clams, boire un thé. Ainsi la plongée associe le loisir, le travail scientifique, la traditionnelle collecte de nourriture (ici modernisée !), l'échange social. Ces moments partagés en famille avec nos amis inuits sont précieux pour chacun de nous.


Préparatifs mission Green Edge

  • Presentation GreenEdge a la mairie de Qikiqtarjuaq
  • Reco Green Edge Ice Camp 14 fevrier 2015

Marie-Hélène Forget et Joannie Ferland, coordinatrices du programme Green Edge qui commence dans trois semaines, sont venues de Québec pour se rendre compte sur place des fonctionnements locaux avant de prendre les décisions finales : loger, nourrir, transporter, faire travailler sur la banquise et dans un laboratoire jusqu'à 20 personnes en même temps dans un village de 500 habitants n'est pas une mince affaire ! Nous préparons le terrain depuis décembre dernier. Pendant 5 jours intenses, elles ont ainsi pu rencontrer, visiter, et confirmer notre souhait que ce programme soit un bel échange avec le village : en utilisant les compétences des inuits (construction de traineaux, guides, veilleur d'ours, aide cuisinier...), en choisissant des logements chez l'habitant, en développant des interactions pédagogiques avec l'école... La conférence publique à la mairie, pour informer des besoins du projet et impliquer les habitants, fut un succès. Lors d'un week-end sur la banquise, Eric les a conduites jusqu'au site d'étude envisagé afin de valider le trajet et observer l'état de la glace sur place, puis nous avons pu les emmener en famille au site de plongée. Collecte d'algues, d'oursins et de clams, et glissades sur les pentes roses de l'île Broughton pendant les quelques précieuses heures de soleil. Dégustation de clams le soir même à bord de Vagabond ! C'était une semaine de vacances scolaires pour Léonie et Aurore, qui ont apprécié l'enthousiasme de nos deux visiteuses !


Ile de Vancouver

  • Shellfish Tour Vancouver Island

La semaine dernière, j'ai été invité par la municipalité de Qikiqtarjuaq à participer à un voyage de 8 jours sur l'île de Vancouver, en Colombie Britannique, avec deux de mes compagnons plongeurs. La production de clams y est très développée, ainsi que la plongée professionnelle et la recherche scientifique. Beaucoup de rencontres et de visites passionnantes, qui devraient contribuer à une saine exploitation commerciale de cette ressource naturelle très convoitée. Le gouvernement du Nunavut a voté un gros budget en janvier 2015 pour développer l'exploitation des ressources marines. L'intérêt des scientifiques pour les clams est également important car leurs coquilles témoignent des caractéristiques de l'océan tout au long de leur lente croissance. Des études sont en cours actuellement pour évaluer les stocks, pour décrire précisément l'espèce et son habitat, et pour mettre en place d’éventuels quotas.

Les premiers consommateurs de clams sont les morses, que l'on aperçoit l'été, à quelques dizaines de kilomètres du village, lorsque la banquise débâcle. Qikiqtarjuaq a vu ses premiers plongeurs en 1997, et pourrait bien devenir un village pilote pour les autres communautés du Nunavut. Aujourd'hui, seuls quatre plongeurs collectent des clams, de façon très artisanale, pour les vendre directement aux consommateurs locaux, 1 à 2$ par clam. Seul et unique métier pour l'un d'eux, activité complémentaire pour les autres. Les préoccupations concernant la sécurité alimentaire, la sécurité des plongeurs, et les coûts associés à la plongée ont empêché l'exploitation commerciale depuis le début des années 2000.


Dix jours sans Eric

  • Degraissage peau de phoque a l'ecole

Le bateau est aux filles pendant dix jours ! Au menu météo, white out, neige, blizzard... mais une semaine passionnante à l'école : un cours de fabrication de kamiks est donnés par les ainées, elles transmettent leur savoir. Pendant 3 semaines la professeur d'inuktitut de Léonie donne un cours vivant. Chaque classe vient assister (pour les plus petits) ou pratiquer (pour les plus grands) à toutes les étapes de fabrication. Dégraissage des peaux de phoques, nettoyage, séchage bien tendues sur cadres, tannage manuel. Idem pour la fameuse semelle en phoque barbu dont la peau, noire lorsqu'on en rase le poil, est si épaisse et si étanche. Chaque étape est aussi précise que délicate, il faut caresser dans le sens du poil ! Puis vient la couture, précédée de l'assouplissement qui donne des crampes aux mains ! J'ai la chance de participer à cet atelier, occasion de changer les semelles de mes kamiks, de donner un coup de main et de pratiquer ces techniques traditionnelles? Je remarque aussi les nuances qui existent selon les villages. Aurore est ravie de m'accompagner, je la découvre tout à fait à l'aise dans son environnement. Léonie est fière lors de ses cours d'inuktitut d'observer sa maman à l'ouvrage !


Ca chauffe !

  • Fin de plongee pour Sammy
  • Moins 41C

-41°C. Pas chaud aujourd'hui. Pas le bon jour pour des problèmes de chauffage. Pourtant, la révision complète de la chaudière était nécessaire car son fonctionnement devenait chaotique. Heureusement, une fois remise en place, quelques heures plus tard, elle démarre au quart de tour. Mais entre temps le poêle a calé et la température est rapidement devenue négative dans le bateau ! L'air froid descend si fort par la cheminée, qu'il nous faut plusieurs heures, et beaucoup de fumée, pour trouver un moyen de rallumer le foyer vital. Soulagement.
Mercredi soir, j'étais invité à présenter Green Edge au conseil municipal de Qikiqtarjuaq, au nom du laboratoire Takuvik, pour qui nous travaillons depuis 2013, et qui est à l'initiative de ce programme scientifique pour 2015 et 2016. J'avais quinze minutes chrono, l'ambiance était très solennelle, et il n'y a guère eu de débat : la municipalité a approuvé le projet ! Un camp de glace sera installé pendant quatre mois au sud de l'île Broughton pour permettre à près de cinquante scientifiques de contribuer à une importante étude du bloom printanier du phytoplancton. Tout doit être prêt pour mi-mars, de quoi bien nous occuper !

Sollicité par les chercheurs pour divers prélèvements sous-marins, c'est aussi l'occasion de retrouver nos amis plongeurs sous la banquise, de ramasser des clams pour nous et quelques amis (outre les échantillonnages scientifiques), et de partager ces moments en famille au bord du trou et dans la cabane de plongée. De plus, après réparation, ma combinaison est à nouveau bien étanche, très appréciable !

Alex Hibbert, pour qui nous avions déposé un gros ravitaillement au nord du Groenland (septembre 2013), est arrivé à Qikiqtarjuaq avec deux compatriotes et un projet très ambitieux. Trop, visiblement, comme le projet précédent : le dépôt avait finalement été offert à un chasseur de caribous. Cette fois, ils veulent parcourir le passage du Nord-Ouest (3200km), sans assistance, sans ravitaillement. Pourquoi ? "Parce que c'est plus dur !" me répond Alex, le soir de nos retrouvailles. Une semaine plus tard, les essais divers ont tout remis en question, il s'agit maintenant d'organiser des ravitaillements, de mettre des harnais aux chiens et de tenter de rejoindre Pond Inlet (800km). Une belle balade, quoiqu'il en soit. Bonne chance !


Fin des vacances

  • Piem et Francois 2 janvier

Les jeux de Noël se sont achevés le 4 janvier. Trois jours plus tard, Aurore et Léonie ont repris le chemin de l'école... pas facile de se lever à 7h du matin, quand on a pris l'habitude de se coucher vers 5h du matin, au retour des jeux !

François et Piem partent aujourd'hui pour Grenoble et Barcelone. Nous avons eu bien du bon temps tous ensemble. Nous avons gravi la montagne au-dessus de Qikiqtarjuaq, participé à une compétition de pêche au lac Bubble, exploré une banquise très accidentée, admiré beaucoup d'aurores boréales, sauté par dessus un feu sur la banquise le 31 décembre. Nous nous sommes sentis Charlie.


Trois frères pour Noël

  • Sapin Vagabond 2014
  • Retrouvailles musicales

Depuis le solstice d'hiver, nous sommes six à bord de Vagabond ! Le lent retour de la lumière coïncide avec le début des jeux, à Qikiqtarjuaq. Pendant une dizaine de jours, nous sommes tantôt au village, avec nos amis inuits, tantôt à bord de Vagabond, en famille. Concours de tir, lancer de harpon, course de lenteur en motoneige, compétition de chasse, jeux collectifs ou messe de Noël dans le gymnase-salle-des-fêtes, musique, festin de caribou congelé, de phoque et de clams... Décoration du bateau, cuisine et cadeaux, musique et informatique, jeux avec les chiots de Pikuli, installation des balançoires, accumulation de neige le long de la coque (isolation), aménagement des toilettes (mur de neige !), collecte de glace à l'iceberg voisin (eau douce)... La vie est belle sur la banquise, avec un très beau cadeau cette année : trois frères réunis pour trois semaines !

Au retour de ma mission en Antarctique (voir l'album photos), j'ai retrouvé Aurore, Léonie et France en Bretagne, pour deux courtes semaines dans la verdure ! Mi-décembre, accompagnés par mon frère François, nous arrivions à Québec pour quelques jours de réunions à l'Université Laval, afin de préparer la grosse mission scientifique prévue de mars à juillet 2015, avec Takuvik. Ce fût aussi l'occasion de visiter le brise-glace Amundsen, à quai à Québec ! Dimanche, un dernier avion nous conduisait jusqu'à Qikiqtarjuaq, où mon frère Piem et nos amis nous ont accueillis chaleureusement. Deux motoneiges et une montagne d'habits chauds étaient prêts pour nous permettre de rejoindre Vagabond, via une banquise d'un peu plus de trente centimètres d'épaisseur. Fin d'un séjour solo de huit semaines pour Piem, bonheur de se retrouver tous à bord.

Joyeuses Fêtes à tous !


Piculi

  • Piculi et ses boules de poil

La banquise est devenue praticable. Il était temps d'y inviter les chiens. Piculi, qui connaissait déjà le bateau depuis l'hiver dernier, vient d'avoir deux petits. Ils ont à peine quinze jours.

En moins de deux heures, Yves a construit une niche pour abriter ces petites boules de poil. D'abord un détour à la décharge du village, pour récupérer du bois et de la mousse isolante. Puis à l'atelier, pour faire un peu de menuiserie.

Sous ses mains habiles, scie sauteuse et marteau ont vite fait de transformer ces vieilles plaques de contreplaqué en un bon abri contre le froid et le vent de la banquise.

Je suis donc revenu avec trois chiens sur le traineau d'un skidoo pour installer mes nouveaux compagnons à côté du bateau. J'étais d'abord un peu inquiet de laisser mes voisins dehors.

Mais quand le ciel est dégagé, ils préfèrent déjà dormir dehors pour admirer les aurores, par -25ºC. Des chiens de l'Arctique, ça ne fait aucun de doute.